Les châtelains de Loisey
au XVIIème et XVIIIème siècle

 

Demandez "Voltaire"? aux habitants de la région et ils vous donneront leur mot de passe : "Marquise du Châtelet"! Demandez ensuite : "Où celà" ? Et ils vous répondront : "Au château de Loisey" !

Les "du Châtelet" s'imposèrent à Loisey pendant la Guerre de 30 ans. Militaires pour la plupart, ils vécurent les drames et les gloires de l'Histoire de France. Et durant presque deux siècles, le château de Loisey les accueillera au gré des événements.

Au fur et à mesure de ces chapitres, vous ferez connaissance avec cette famille dite des "Grands Chevaux de Lorraine", les "du Châtelet" et leurs illustres représentants... Pour finir, la Révolution, sous vos yeux, y aénantira le présent et le passé...

Ces souvenirs apparaissent comme le reflet d'une gloire lointaine qui, lorsqu'on l'évoque, éclaire notre village !

Bernard THOMAS


 

 

 

 

 

 

La famille du Châtelet.

Dom Pelletier, dominicain, curé de Senones, établit en 1744 -en pleine période de gloire de la marquise du Châtelet-, un armorial général de Lorraine et du Barrois.
Il nous permet ainsi de faire connaissance avec les du Châtelet.
"Maison de nom et d'armes illustre et très ancienne, puisqu'elle descend, en ligne masculine, des Ducs de Lorraine, par Thierry D'Enfer, fils puiné de Frédéric (ou Ferry) de Bitche, Duc de Lorraine vers 1210.
"Elle porte sur ses armes "d'or, à bande de gueule chargée de trois fleurs de lys d’argent". Les cadets ont gardé les mêmes armoiries que les aînés. "Elle est en droit de porter, sur ses armes, un manteau ducal que, par la suite, le Duc Léopold ne lui a point querellé".
"Son cri de guerre est : "Priny - Priny".
"Sa devise : "Race du Châtelet qui d'un ardent courage a toujours exercé, pique, lance, arc et trait".
Thierry, héritant de la vallée de Removille (près de Neufchâteau) y fit construire une forteresse qu'on appela Le Châtelet. Suivant l'usage de ce temps de nommer les cadets du nom de leur apanage, on attribua donc ce nom à Thierry.

 

 


Armoiries de la famille du Châtelet.

 

Les Grands Chevaux de Lorraine.

Au cours des temps, cette famille a formé plusieurs branches dont : Les Trichâteau-Lomont, les Pierrefitte.
Cette maison fait partie de ce qu'on a appelé "Les Grands Chevaux de Lorraine", privilège partagé avec trois autres maisons de Lorraine.
Elle s'installe dans notre région au XVème siècle. En juillet 1437, Rodolphe de Linange vend à Errard III du Châtelet, seigneur de Cirey, la seigneurie de Pierrefitte et les villages environnants dont Loisey et Culey (qui en faisaient déjà partie en 1359). Elle a un château à Naives-devant-Bar (pas encore à Loisey).

Pacifiques, dociles, les "Grands Chevaux de Lorraine" ?
Guerriers et indociles, plus certainement !
Errard III du Châtelet aida le Duc de Lorraine, René 1er, à combattre le Comte de Vaudemont en 1437. En conséquence, les troupes de ce dernier ravagèrent la Châtellenie de Pierrefitte.
En 1477, Guillaume du Châtelet, Chambellan de Louis XI, combat aux côtés de René II, Duc de Lorraine, contre Charles le Téméraire à la bataille de Nancy et y perd la vie.
Olry du Châtelet est tué en 1569 au siège de La Charité Sur Loire, dans les rangs des armées protestantes.
Notons à ce sujet que la Réforme, grand flux d'idées nouvelles, fait bien des vagues dans cette famille, puisque, outre le décès cité, on trouve chez les du Châtelet : Des "mariages mixtes", des Chevaliers de Malte qui épousent la nouvelle religion (l'un d'eux devient pasteur), une supérieure d'abbaye qui abjure et, localement, ceci :
Antoine du Châtelet (décédé à Cirey en 1620) accordait sa protection aux assemblées huguenotes qui se tenaient notamment à Culey, chez un nommé Martin le Glaive, couturier.
Se joignaient à ces assemblées, des fidèles venant de Longeville, conduits par un nommé Claude Vallot.
Ces fidèles disent qu'ils sont soutenus par le Baron de Saint-Amand de la famille du Châtelet.


Ensuite survient la Guerre de Trente Ans, dont les ravages se fond sentir en Lorraine au moins de 1630 à 1661.
Résumons cette période : Courses incessantes de six armées : Soldats lorrains, français, suédois, croates, impériaux, suisses. La troupe vit sur le pays qu'elle occupe.
Destruction de biens et de récoltes, crimes, meurtres, incendies... Tout cela est monnaie courante.
Dans le Barrois Mouvant, qui n'est pas la partie de la Lorraine la plus éprouvée, on signale que Géry, Loisey, Culey, Salmagne, ont subi une longue période de difficultés.
Il ne reste que 15 feux à Loisey, autant à Culey : Deux villages qui, en 1600, étaient parmi les dix plus riches du Barrois.
Pour se protéger des exactions, il arrive que l'on verse (en vain souvent) une rançon à la soldatesque.
C'est dans cette période de guerre et de désolation que Louis-Jules du Châtelet (branche Pierrefitte), décida d'ériger un château sur ses terres, à Loisey.

 

 


Les bannières des Grands Chevaux de Lorraine.

 

 

Arbre généalogique de la maison du Châtelet-Pierrefitte.

Historique des signatures.

 

Louis-Jules du Châtelet :

En 1640, Louis-Jules du Châtelet oblige les habitants de Loisey à vendre : Le 1/4 des bois d'usage de la communauté à Rouillon (un prétendu créancier), et les 3/4 restants à lui-même, au prix de 50 Francs barrois l'arpent ; montant total : 13275 Francs barrois, prétextant qu'il aurait déboursé 14000 Francs pour exempter les habitants du logement des troupes. En 1646, le seigneur se fait décharger du prix à payer (principal et arrérages) toujours sous le même prétexte.
Il contraint de signer en employant la force : menaces, coups, mauvais traitements exercés par ses soldats, valets et domestiques (il s'était fait, auparavant, céder les bois de Rouillon).
A la même époque, il s'empare d'une partie du grand chemin royal au milieu du village de Loisey, d'un jardin dépendant de l'école, et d'un terrain devant le presbytère, afin de comprendre le tout dans le périmètre du château qu'il commence à édifier.
Louis-Jules du Châtelet, ancien gouverneur d'Aigues-Mortes, est dans une passe difficile : Servant le Duc de Lorraine, il s'est rangé avec celui-ci aux côtés de Monsieur, Frère du Roi Louis XIII (le Duc d’Orléans) qui, combattant Richelieu, s'opposait en fait, au Roi (La Fronde).
Le Duc d'Orléans en avait fait son premier Chambellan. Mais en cette période trouble, les alliances sont éphémères : Le Duc d'Orléans, cessant pendant un temps son combat, Louis-Jules du Châtelet se trouve sans appui. Son commandement d'Aigues-Mortes lui est retiré, ses biens confisqués. On rase son château de Cirey et aussi celui de Naives-devant-Bar ; ce dernier aurait servi, dit-on, à bâtir en partie celui de Loisey.
En s'installant à Loisey, Louis-Jules du Châtelet, ruiné, veut "se remettre en équipage", d'où les exactions citées.
Il y ajoute le maintien de prérogatives obsolètes ; les bois spoliés rapportaient à l'ancienne famille propriétaire, une poule par an et par habitant, et ceci depuis l'origine du contrat. Il persiste à exiger cette redevance devenue exorbitante pour l'époque : En 1638, le fermier du four de Loisey était mort de faim.
L'édification du château aurait commencé en 1650.
Charles de Saint-Hilaire, décédant à Loisey en mars 1650, donne en héritage à son cousin Louis-Jules une partie supplémentaire de la Châtellenie, ce qui arrangea sans doute un peu les affaires du seigneur, qui le fit inhumer dans l'église de Loisey.
Louis-Jules du Châtelet décède en 1672 à Paris. Il est inhumé dans l'abbaye Saint-Victor.
Des onze enfants de Louis-Jules, aucun n'assurera une descendance mâle. Seul, Charles, Marquis de Cirey, a un fils, Armand à qui il laisse la seigneurie de Pierrefitte, mais Armand est tué à la guerre en 1693, quelques mois après le décès de son père.

 


Un document rare : En 1624 (une vingtaine d'années avant de bâtir à Loisey) Louis-Jules du Châtelet accorde un privilège aux habitants du village : Ils percevront la recette des amendes infligées aux fraudeurs sur le vin.

Un texte difficilement déchiffrable, mais intéressant pour la signature. (Archives départementales de la Meuse référence 6 E 72)

 

Charles-Antoine du Châtelet :

C'est un autre fils, Charles-Antoine, qui poursuivra jusqu'à son terme (1666), la construction du château de Loisey.
Charles-Antoine (marié à Marie de Neuville) a de grands titres : Lieutenant général des Armées du Roi, successivement Gouverneur de Douai, Gravelines, Metz... Il a aussi la même funeste réputation que son père : "Tant qu'ils ont vécu (le père et le fils), ils étaient plus craints et redoutés que les souverains. Ils ont fait signer, par force et violence, différents contrats dans plus de 10 communautés. Ils ont même maltraité des personnages de considération, tel le Procureur Général".


Charles-Antoine décède à Paris en 1680 ; il est inhumé dans la même abbaye que son père.
C'est seulement après la mort de Charles-Antoine que les habitants de Loisey, auparavant tétanisés par la crainte des seigneurs, demandent à sa veuve Marie de Neuville, réparation des malversations et préjudices divers de Louis Jules et Charles-Antoine.
Faute d'arrangement amiable, ils plaident à Bar et ont gain de cause en avril 1684.
Dame Marie de Neuville fera ensuite appel au Parlement de Paris. Ce recours fut vain car ce nouveau procès fut gagné en appel par les villageois et les derniers dommages payés à la communauté en 1709.

 


 

Factum complet (jugement) du procés
intenté par les habitants de Loisey
aux descendants de Louis-Jules du Châtelet

Ce document exceptionnel est daté de 1684. Il est conservé aux archives départementales de la Meuse (référence 1 J 251). Le papier parait assez fragile et dégradé et les parties manuscrites sont difficilement lisibles.
Un fait rare dans les décisions de justice de l'époque : Le grand bailli de Bar-le-Duc ordonne aux descendants de la famille du Châtelet, de verser aux habitants de Loisey des compensations financières en réparation des exactions que Louis-Jules et Charles-Antoine du Châtelet ont fait subir à la population.

Première page du factum.

Deuxième page.

Troisième page.

Quatrième et dernière page.

 


 
 

Marie-Gabrielle-Charlotte et Florent du Châtelet-Lomont :

A son décès, Charles-Antoine n'a qu'un enfant : Marie-Gabrielle-Charlotte. Sa mère l'a mariée en mars 1692 avec son lointain cousin Florent du Châtelet-Lomont, de la branche du même nom.
Faisons le point sur le couple.
- Marie-Gabrielle-Charlotte, cousine au 5ème degré du Duc de Lorraine, Dame de Cirey, Pierrefitte et Saint-Amand, est héritière de la Châtellenie de Pierrefitte que lui lègue sa tante Nicole : Il n'y a plus de Châtelet mâle dans cette branche et les quatre autres tantes sont religieuses.
- Elle a 14 ans.
- Florent du Châtelet-Lomont parcourt une longue et brillante carrière militaire. D'abord destiné à l'église, il est reçu chanoine, mais il préfère la carrière militaire : cadet sans biens, quelle gageure !

Aide de camp du Maréchal de Turenne, plusieurs campagnes, autant de blessures (dont 3 la même journée), il défend Namur avec tellement de brio que le Roi le fait Maréchal de Camp et Commandeur de l'Ordre de Saint-Louis. Gouverneur de Dunkerque pendant 17 ans, il sera plus tard Lieutenant-Général des Armées du Roi (1702) et promu Grand Croix de l'Ordre de Saint-Louis (1709).
Il gardera toute sa vie le titre de Comte de Lomont. - il a 40 ans -.
Le contrat de mariage le donne comme demeurant à Paris, rue des Petits-Champs, Paroisse Sainte-Eustache.
Florent obtient en septembre 1705 (un mois après le décès de sa femme) des lettres patentes de S.A.R. le Duc de Lorraine et de Bar "pour l'inféodation de la Châtellenie de Pierrefitte et sa maison et château de Loisey" (ce qui officialise la fin de la branche Châtelet-Pierrefitte).
Son épouse, morte à Dunkerque à l'âge de 28 ans, lui a donné 7 enfants : Aucun n'a vu le jour à Loisey.
Un garçon (Gaspard) meurt en bas âge. Les trois autres épouseront la carrière des armes : Florent-Claude, Marquis du Châtelet, futur époux de la Marquise (nous en reparlerons). Honoré-Roger, décédé sans alliance en 1721, et Florent-François, le cadet des garçons, dernier hôte du château de Loisey.
Le sort des filles est le suivant : Marie Gabrielle, appelée Mademoiselle d'Origny, mourra à Semur en Auxois, âgée de 33 ans, en 1729. Les deux autres filles ont un destin curieux :
Suzanne-Marie-Madeleine, appelée Mademoiselle de Pierrefitte était destinée à être abbesse à Remiremont, ainsi que sa soeur Marie-Florence, appelée Mademoiselle de Saint-Rémy. Or, toutes deux se marient nuitamment, à 6 mois de distance en 1731.
Dom Cellier, qui cite ces mariages nocturnes, n'en précise ni le lieu, ni les raisons... dommage !
Par contre, Dom Calmet qui a publié une histoire de la maison du Châtelet en 1741 évoque ces mariages de nuit avec quelques menus détails :
- Suzanne, qui est née en 1703, a été mariée dans la nuit du 30 au 31 janvier 1731 avec Jean-Nicolas de Chaugy, marquis de Roussillon (C'est elle qui a une chambre au château de Loisey, où elle décèdera en 1778. Elle est inhumée dans l'église de Loisey).
- Florence, qui est née en 1704, a été mariée dans la nuit du 23 au 24 juillet 1731 avec Melchior-Esprit de la Baume, Comte de Montrevel (un fils est né de ce mariage en 1736).

Pourquoi ces mariages nocturnes ?
On suppose qu'il y avait une grande part de superstition dans cette façon de faire, car au XVIIème siècle, on était persuadé que le diable dormait à partir de 2h du matin.
Or, ce diable avait le pouvoir de "nouer les aiguillettes"... en français actuel de pouvoir rendre l'homme impuissant et l'empêcher de consommer son mariage... Chose impensable dans ce milieu à l'époque, car les mariages étaient souvent conclus en vue de perpétuer la lignée.

A la fin de sa vie, Florent, Comte de Lomont, se retire au milieu de sa famille à Semur-en-Auxois où il décède en 1732. Il est inhumé dans l'église des Chanoines réguliers de cette ville, à côté de sa fille Marie-Gabrielle-Catherine.
Les archives, un peu plus disertes au XVIIIème siècle, ne parlent pas de mauvaises relations entre le châtelain et les villageois. La nouvelle dynastie est sans doute plus humaine et les cicatrices de la guerre de 30 ans se referment petit à petit.
De 15 feux à Loisey, autant à Culey en 1632, la population passe à 148 feux à Loisey, 82 à Culey en 1706, et 186 feux à Loisey et 100 à Culey en 1746.
Embellissant son château en 1741, le châtelain fait également modifier l'église de Loisey et construire une nouvelle cure. Les impôts payés au baillage de Bar par les habitants sont allégés pendant 2 ans, vraisemblablement pour aider à ces constructions. Il fait améliorer et empierrer le chemin allant du pont de Tannois à Géry (l'actuelle route départementale n°6) et la fait entretenir à corvée, facilitant ainsi le transport de ses bois et autres denrées. Il achète, au Duc de Lorraine, une partie de la forêt de Sainte-Geneviève et y plante des bornes pour délimitation ; un plan est établi... Les moeurs ont bien changé en un siècle !
Le château "visité" par ses propriétaires au gré des aléas de la vie de garnison ou des campagnes, est habité par le gérant, appelé admoniateur. Celui-ci est lié par contrat avec le seigneur pour 3, 6 ou 9 ans. L’admoniateur a une lourde charge, il s'occupe des biens du châtelain pour l'ensemble de la châtellenie qui comprend 9 villages : Pierrefitte, Rupt devant Saint-Mihiel, Rumont, Naives devant Bar, Rosières, Erize Saint-Dizier, Erize La Brulée, Culey, et Loisey.
En fait, le châtelain partage cette propriété, dans des proportions différentes avec le Duc de Lorraine (on écrit souvent Son Altesse Royale, ou, plus simplement : le Roy) et des lointains cousins : la famille de Franquemont.
Par ailleurs, communautés religieuses et paroisses ont aussi leurs biens et la propriété individuelle va se développer au cours du XVIIIème siècle.
Une administration seigneuriale complexe régit les rapports entre les habitants des villages et le seigneur, grâce à des "fonctionnaires" titulaires de différentes charges (qui deviendront souvent héréditaires). Si le siège de la Prévôté est à Naives devant Bar, le coeur de la châtellenie est bien là où le seigneur a fixé sa demeure : Loisey.

Les titulaires des différentes charges se rendent souvent -sans doute- au château : maires, procureurs fiscaux (ou leurs substituts), gruyers pour les forêts, prévôts pour la police, garde-chasse, donnant ainsi au village une importance qui va croissant... Les registres paroissiaux font état, régulièrement, de mariages dans lesquels on trouve : lieutenant de prévôt, substitut, greffier...
A l'occasion de baptêmes et si l'un des seigneurs est présent à Loisey, on lui demande d'être parrain d'un enfant... Mais point de baptême (ni de mariage) à Loisey dans la famille du Châtelet.
Un document, le seul, nous éclaire sur ce que fut, sans doute, une belle réunion de famille au château de Loisey le 28 octobre 1729 :
A l'occasion du mariage de son secrétaire Jean-Baptiste Unique, dit Mayence "qui vient d’Allemagne où il a de la famille" avec mademoiselle Madeleine Philippe, Florent du Châtelet, Comte de Lomont, Comte d'Origny, Lieutenant-Général des Armées du Roy, et ci-devant Gouverneur de Dunkerque, Grand Bailly de Saarlouis, Grand Croix de l'Ordre de Saint-Louis, reçoit en son château de Loisey : Son fils Florent-Claude, Maître de camp au Régiment de Hainaut-Infanterie, Gouverneur de Semur en Auxois, Marquis de Cirey, qui est accompagné de son épouse : Emilie Le Tonnelier de Breteuil ; ses filles Marie-Madeleine-Suzanne du Châtelet-Pierrefitte et Marie-Florence du Châtelet Saint-Rémy; son fils cadet Florent-François, Guidon de Gendarmerie, Lieutenant-Colonel, Chevalier non profès de l'Ordre de Malte ; et Jean Brouilly, ancien militaire, nouvellement anobli, qui a pris le nom de Brouilly de Loisey.
Le contrat de mariage a été signé au château, en présence, en plus des personnes précitées, de 3 témoins, 2 notaires et un prêtre.

 


Portrait de famille par François-Hubert Drouais - 1756
(National Gallery of Art de Washington)

 

 

Un mariage dans la petite noblesse au XVIIème siècle

 

 

Plans de propriétés de la famille du Châtelet sur le territoire de Loisey. (Plans conservés aux archives départementales)

 

 

Florent-François du Châtelet :

Florent-François, le cadet des enfants de Florent, est le dernier occupant du château et, sans doute, celui qui y résida le plus longtemps. (une vingtaine d'années).
Célibataire, c'est à lui qu’échoient la châtellenie de Pierrefitte et le château de Loisey.
Sa carrière militaire peut être décrite à grands traits :
Florent-François est "Chevalier non profès" de l’ordre de Saint Jean de Jérusalem (actuellement ordre de Malte). C’est comme officier qu'il y fit ses premières armes de 18 à 20 ans, sans doute sur des galères de l'ordre de Malte, qui à l'époque, combattaient les pirates barbaresques en Méditerranée.
Il servit ensuite en 1721 comme Lieutenant de compagnie au Régiment de Hainaut, Capitaine en 1723, Lieutenant-Colonel en 1727, Brigadier de cavalerie en 1744, Maréchal de camp en 1748 ; il est promu Lieutenant Général des Armées du Roi en mai 1758. Il fait campagne en Allemagne, en Bohême, se bat dans les Flandres, à Fontenoy ; il prend part aux sièges de plusieurs villes du Nord et de la Belgique actuelle.


On trouve trace de Florent-François à Loisey en 1745, puis ensuite, régulièrement de 1764 à 1783, époque où il profitait de sa retraite.
Florent-François fut également nommé gouverneur de Port-Louis le 8 juin 1764... Titre honorifique, il n'occupa jamais le poste. Il résidait à Loisey, mais il en perçut le bénéfice...
On ne lui trouve ni alliance, ni descendance ; de ce fait, il sera le dernier maillon d'héritages successifs dont bénéficiera son neveu, Louis-Marie-Florent du Châtelet. Dans le testament qu'il établit pour ce dernier, il sera également trés généreux pour son entourage.
Deux notables, hommes de confiance, signeront le testament comme témoins : Pierre Varin, Mayre Royal et François Morel, maître chirurgien du Chevalier et notaire. Ce dernier reçoit du seigneur une marque particulière d’attention : il continuera à jouir de la maison qu’il occupe (propriété du châtelain) jusqu'à son décès.


Le 17 juillet 1783, le chevalier Florent-François du Châtelet décède si brusquement dans son château que l'abbé Lemoine, curé de Loisey, n’a pas pu arriver à temps pour l’assister.
On l'inhume le lendemain 18 juillet dans l’église de Loisey avec le cérémonial habituel. Les autorités sont peu nombreuses : deux personnes seulement signent l’acte établi par le prêtre : Antoine Aubry, Ecuyer, Prévôt de la terre de Pierrefitte, et Nicolas Vayeur, conseiller d’état et lieutenant général du bailliage de Bar-le-Duc (l'équivalent de nos actuels préfets).
On ne signale aucune famille. La pose des scellés au château a commencé le 18 juillet à 8 heures du matin ; elle se poursuit jusqu’à 19 heures, coupée d'une pause a midi. Lorsqu'elle débute, le corps du chevalier repose encore sur son lit, dans la chambre « cramoisi ». On suppose que Monsieur Vayeur qui participe à l'inventaire, a dû prendre une heure pour assister à la cérémonie religieuse. On reprend la pose des scellés le lendemain 19 juillet dès 5 heures du matin. Elle se termine à 19 h. C'est long car on inventorie toutes les pièces, ouvrant tiroirs, portes de placards, d’armoires, de buffets... On pose sur chaque meuble visité une « liasse de sécurité » (sorte de ruban) que l’on fixe à chaque extrémité par un cachet de cire frappé aux armes du bailliage de Bar.
Une bourse contenant 50 louis, laissée en évidence, est remise à l’exécuteur testamentaire pour qu’il puisse acquitter les frais funéraires les plus pressants.
Au moment du décés de Florent-Francois, Mademoiselle Renault réside encore au château en même temps que onze personnes assurant le service : la gouvernante, deux laquais, deux palefreniers (ou cochers), un cuisinier, trois aides de cuisine, un jardinier.
Monsieur Pérard, chargé maintenant de la surveillance des scellés posés au château est (probablement) l’homme de chambre du chevalier.
Par testament, Florent-Francois a demandé que l’on fasse des célébrations "pour le repos de son âme". Une messe anniversaire à dire à Loisey et 500 messes à célébrer par les frères Cordeliers de Ligny. Les autres dispositions du testament sont généreuses :
- 500 livres, plus sa garde-robe, linge et habits sont donnés à son homme de chambre Pérard ;
- 300 livres à Mademoiselle Gérard, la gouvernante ;
- 150 livres à son garde général des forêts Francois Prévost ;
- 100 livres à chacun des deux laquais, Mayeur et Marson et à son cocher Nicolas Gabriel ;
- Une année de gages aux autres domestiques au service du chevalier au moment du décès ;
- 1000 livres à la maison de charité de Loisey, pour les malades ;
- 100 livres seront distribuées aux pauvres de la paroisse pendant trois années consécutives ;
- En guise de paiement, son exécuteur testamentaire se voit attribuer une bague estimée à 50 louis.


Florent-François avait demandé à être inhumé dans l'église de Loisey, devant le maître-autel, à côté de son frère le marquis Florent-Claude, seigneur de Cirey, et de sa soeur, Marie-Madeleine-Suzanne (qui n’a pas de pierre tombale).
Dans les semaines qui suivront, on posera une dalle de marbre noir sur la tombe du chevalier.
Sur sa pierre tombale brisée, on loue ses vertus sociales... Langage du temps, peut-être, mais aussi rachat des blessures laissées par ses ancêtres Charles-Antoine et Louis-Jules, un siècle plus tôt.
C'est le dernier des "Grands Chevaux de Lorraine" ayant vécu au château, à reposer dans l'église de Loisey.

 


Galère de l'Ordre de Malte du XVIIème siècle, reconstitution du Musée d'histoire navale de Venise.
(Document Wikimedia Commons)
By Myriam Thyes (my own photograph, digitally worked by me) [CC BY-SA 3.0 (http://creativecommons.org/licenses/by-sa/3.0) or GFDL (http://www.gnu.org/copyleft/fdl.html)], via Wikimedia Commons

 

 

 

 

 

 

Pierre tombale du chevalier Florent-François du Châtelet

Pierre tombale du chevalier Florent-François du Châtelet qui repose dans l'église de Loisey.

 

 

 

 

Florent-Claude et Emilie, marquise du Châtelet :

Florent-Claude du Châtelet, fils aîné de Florent du Châtelet, naquit à Namur le 27 avril 1695. Il se voua, dès sa jeunesse, à l'état militaire.
Il épousa, le 20 juin 1725, Gabrielle-Emilie de Breteuil, à qui sa science et ses rapports avec Voltaire ont fait une certaine célébrité.
Florent-Claude entra, en 1712, dans la première compagnie des mousquetaires du roi et fit les campagnes de Landau et de Fribourg. Il fut nommé, en 1714, sous-lieutenant dans le régiment du roi. En 1725, il remplaça son père comme gouverneur de Semur et grand bailli d'Auxois ; puis, en 1732, comme bailli de Saarlouis. Il fit, en qualité de brigadier du régiment du roi, les campagnes de 1734 et 1735, en Allemagne, sous le duc de Bervick, le marquis d'Asfeld, le comte de Coigny et le duc de Noailles ; il était au siège de Philipsbourg. Il fut nommé maréchal de camp en 1738 et servit avec ce grade sous les maréchaux de Maillebois, en 1741 ; de Broglie, en 1743, et de Coigny, en 1744. Il était lieutenant général de l'armée du roi en 1745 et servait avec ce grade, tant en Allemagne qu'en Alsace, sous le maréchal de Noailles, le prince de Conti, le maréchal de Balincourt. Le 9 septembre 1746, il recevait le commandement du régiment de Quercy. Le 1er mai 1748, il fut mis à la tête des troupes qui tenaient garnison dans la Lorraine et le Barrois.
Pendant ce temps, il habitait Lunéville et recevait, comme lieutenant général, 12.000 livres d'appointements par an.
En 1763, il était gouverneur de Toul, bailli de La Marche en Barrois, grand'croix de l'ordre de Saint-Louis.
On voit, par ce qui vient d'être dit de la vie militaire de Florent-Claude du Châtelet, que, jusqu'en 1749, il fut le plus souvent dans les camps. Le reste de son temps se passait à Cirey, à Semur et à Paris. Il avait un hôtel à Paris, rue Jacob.
Il fit, à différentes reprises, acte de foi et hommage tant au roi qu'au comte de Brienne et au prince de Joinville.

Les revenus de la terre de Cirey consistaient, à cette époque, principalement dans le produit des bois, des usines, de quelques fermes et des droits seigneuriaux.
Pour éviter les embarras, Florent-Claude affermait ordinairement ses revenus. On a de lui un certain nombre de baux. Il fit faire, en 1738 et 1739, par Nicolas Neveux, un arpentage de toutes les propriétés qui composaient la baronnie de Cirey et la division des bois en coupes réglées. Les seigneurs de Cirey possédaient, à cette époque, un tiers de la seigneurie d'Arnancourt; les deux autres tiers appartenaient à la famille d'Allonville.
Florent-Claude fut inquiété au sujet de la seigneurie de Bouzancourt, par le duc d'Orléans, qui prétendait avoir des droits sur cette seigneurie.
Florent-Claude hérita de Marc-Antoine du Châtelet, son cousin-germain, une partie de sa fortune, notamment cette terre de Beringhen que Voltaire proposa plusieurs fois au roi Frédéric. A l'occasion de ce testament, Florent-Claude eut à soutenir un procès qui se termina par une transaction. Il hérita, en outre, de différentes terres en Franche-Comté, de son cousin Ferdinand-Florent du Châtelet, seigneur de Lomont.
Florent-Claude du Châtelet fit, comme ses prédécesseurs, quelques travaux au château de Cirey, destinés à utiliser les ruines faites par les événements de 1633. On peut citer notamment la construction de l'orangerie, la porte monumentale du balcon, les murs de soutènement des bords du canal de la Garenne, l'auditoire de la justice seigneuriale, la halle du centre de la commune. Mais la plus importante des constructions de Florent-Claude fut celle du bâtiment qu'il ajouta au château,

Florent-Claude du Châtelet perdit son épouse, Gabrielle-Emilie de Breteuil, en l'année 1749. Il avait eu d'elle quatre enfants.
Dans ses dernières années, Florent-Claude du Châtelet habitait ordinairement Lunéville, où il remplissait les fonctions de grand chambellan et de grand maréchal des logis du roi de Pologne, duc de Lorraine et de Bar. Il faisait de là des excursions dans ses terres et gouvernements ; il allait particulièrement à Loisey, qui dépendait de la châtellenie de Pierrefitte. C'est là qu'il mourut, le 28 novembre 1765.

M. Alliot, intendant du roi de Pologne à Lunéville, fut informé de la mort de Florent-Claude par un courrier arrivé de Loisey dans la soirée du 28. Il n'osa l'apprendre immédiatement à Stanislas, dans la crainte de troubler son sommeil. Stanislas, ayant connu la nouvelle à son réveil, en conçut un vif chagrin ; il chargea immédiatement M. Alliot d'écrire à Florent-Marie, alors ambassadeur à Vienne, pour lui faire ses condoléances ; il fit ajouter qu'en perdant Florent-Claude du Châtelet il perdait « son meilleur ami ».
Il songea aussitôt à donner au fils la charge qu'avait remplie le père et fit mettre sur la missive à Florent-Marie la qualification de grand chambellan du roi de Pologne.
Florent-Claude fut enterré dans l'église de Loisey.
Une tombe de marbre noir recouvrira ses cendres et portera une épitaphe.

Pierre tombale de Florent-Claude du Châtelet

Pierre tombale du marquis Florent-Claude du Châtelet qui repose dans l'église de Loisey.

 

Gabrielle Emilie Le Tonnelier de Breteuil naît à Paris le 17 décembre 1706. Son père est introducteur des ambassadeurs.
Emilie, c’est ainsi qu’on la nomme habituellement, apprend rapidement le latin, l’espagnol, puis ensuite l’anglais ; elle lit les classiques de ces trois langues ; à 15 ans, elle entreprend une traduction de Virgile.
"Esprit pénétrant, délié, judicieux, investigateur, s’attaquant à tout ; très éloquente lorsque le sujet lui plaît, avec le mot propre, la précision et la justesse dans le propos. Elle n’est pas inaccessible aux beautés du sentiment ; sensible à l’harmonie et aux charmes de la poésie, elle sait par coeur des milliers de vers, mais ne peut souffrir les médiocres" (cette analyse, sans doute assez partiale, est de Voltaire).
Elle est mariée en 1725 au Marquis Florent-Claude du Châtelet, (aîné de la famille), brave militaire qui n’était qu’un brave homme. Entrée dans le grand monde par le mariage (les du Châtelet font partie des "Grands Chevaux de Lorraine", et seules 4 familles peuvent s’enorgueillir de ce titre), elle trouve le moyen de faire marcher de front étude et dissipation ; n’essayant pas de résister aux tentations de l’exemple, elle n'eut pas de meilleures moeurs que les femmes de son milieu en son temps.
Les Du Châtelet ne roulaient pas sur l’or, les Breteuil étaient riches. Par malheur, Emilie avait gardé ses goûts Breteuil et quelques autres fort dispendieux : la manie du jeu et un amour délirant des pierreries.

Un soir de 1733, trois amis, (dont Madame du Châtelet) viennent relancer Voltaire dans sa tannière ; ils acceptèrent l’invitation à revenir qu’il leur fit. Dés ce soir-là, ils s’adorèrent... C’est ainsi que commença un amour -une amitié- qui dureront 16 ans, entre Voltaire et Emilie. Il connaissait Madame du Châtelet depuis longtemps. Elle était encore enfant lorsque son père avait bien aidé Voltaire à sortir de la Bastille, d’ou des relations avec cette famille.
Le monde ne tarda pas à apprendre la nouvelle, mais il ne savait pas qu’une des femmes les plus savantes et les plus galantes de son temps venait de s'engager avec le plus grand écrivain dans la liaison amoureuse la plus célèbre de l’histoire littéraire du XVIIIème siécle.
Voltaire fut-il fasciné par sa beauté ? Peut-être pas, mais elle n’était pas aussi mal que Madame du Deffand en fit le portrait ainsi résumé :
“Représentez-vous une grande femme sèche, sans hanches, la poitrine étroite, de gros bras, de grosses jambes, des pieds énormes, une trés petite tête, Ie visage aigu, le nez pointu, deux petits yeux vert-de-mer, le teint noir, rouge, échauffé, la bouche plate, les dents clairsemées et extrêmement gatées... Voilà la figure de la belle Emilie... Comme elle veut être belle en dépit de la nature et magnifique en dépit de la fortune, elle est souvent obligée de se passer de bas, de chemises, de mouchoirs et autres bagatelles"... La haine fait dérailler Madame du Deffand,
d’ordinaire tout aussi méchante, mais plus fine... Lorsqu’Emilie, dans ses jours de frénésie, apparaissait scintillante de diamants -peut-être un peu faux-, fardée à faire peur, bardée de mille rubans multicolores et papillonnants, on trouvait, non sans malice, qu’elle représentait assez une mule pontificale processionnant des reliques... Aprés tout, le surnom d’écureuil, pour Voltaire, ne suggérait pas un Adonis...
Voltaire adora Emilie telle qu’elle était, mais surtout belle de cette supériorité du coeur et de l’intelligence qui la rendait digne de lui. Elle l’amusa par ses caprices, ses colères criardes et même, parfois, ses infidélités.
Souvent obligé de quitter la capitale, et la France, Voltaire trouve asile a Cirey, en Champagne, propre demeure du Marquis du Châtelet... Parfait asile puisque le parfait mari bénira le choix des amants...
La vie de la belle Emilie suivra pendant 16 ans celle de Voltaire, même s’ils furent parfois séparés. Elle travaillait beaucoup, étudiant la géométrie, la physique, perfectionnant son anglais (langue qu’elle pratiquait avec Voltaire quand les circonstances exigeaient la discrétion). Dans ses ouvrages, on relève les titres suivants :
- Institution des physiques.
- Doutes sur les religions révélées.
- Discussion sur la nature et la propagation du feu.
- Principes mathématiques de la philosophie naturelle. (traduction de l'anglais)
En concourant pour le prix de l’Académie des Sciences (avec son ouvrage sur le feu), elle ne manqua le prix que de quelques voix.
La Marquise avait réputation d’une table où les plats étaient réduits en nombre et en qualité, le vin : de la piquette. A Paris, Monsieur du Châtelet n'était pas riche ; a Cirey, c'est Voltaire qui payait le train de maison qu’il voulait opulent, mais Emilie gardait ses manies.
Pour l’emploi du temps, c’était la caserne -ou le couvent- au choix ! La nymphe et le dieu se levaient a 5h, sauf invitation . Nul ne devait sortir de sa chambre avant 10h, l’un et l’autre travaillant dans sa chambre ; a 10h, café, puis le travail reprenait jusqu’au déjeuner de midi. M. du Châtelet, lorsqu’il était là, mangeait à part, car il s’endormait aux conversations savantes. Sa femme et Voltaire mouraient d’ennui aux récits des campagnes du Marquis. Cette séparation plaisait à tous. Ensuite, conversation avec les invités, puis après les congratulations et les manières de cour, l’ami poussait les invités vers la sortie. ll regagnait sa chambre et travaillait jusqu’au souper a 9h. Parfois, à 4h, il prenait une collation en compagnie d’Emilie.
Emilie, elle, travaillait plutôt la nuit. Comme il fallait prendre de l'exercice, parfois la Marquise allait à cheval, accompagnant Voltaire qui, lui, était en calèche.
A Cirey, on jouait la comédie deux fois par semaine ; c'était plus un culte qu'un divertissement. On jouait surtout les tragédies du Maître.
Cirey est un point d’ancrage que Voltaire remet en état de ses deniers pour les parties que le “trio” habite ; pour les invités, le logement restera sommaire...
Mais de Cirey on s’éloigne souvent, et parfois longtemps. Outre Paris, pour des raisons diverses, on trouve le couple à Liège, Bruxelles (où Voltaire gagne un procés... ce qui permet à Emilie d’acheter l’hôtel Lambert, à Paris, que l’ami -l’avare- va faire réparer et meubler. Ils sont aussi à Versailles suivant les humeurs de la Cour, au château d’Anet, à Fontainebleau. Et puis, on vient en Lorraine : Nancy et surtout Lunéville, Commercy, faire la cour au Roi Stanislas...

Emilie qui lésinait sur le pain et le sel avec ses domestiques, était une joueuse forcenée et, bien entendu, malheureuse. A Fontainebleau, un soir, au jeu de la Reine, elle se mit à perdre d'une façon effrayante : Les 400 louis réunis à grand peine s'évaporèrent en un clin d'oeil ; Voltaire enrageant mais muet, surveillait le jeu ; il avança 200 louis, aussitôt engloutis. Les observations qu'il fit lui furent vertement retournées : nouvel emprunt, nouvelle perte... Puis on joua sur parole et le désastre fut total : Emilie perdit en tout 103.000 livres ! Voltaire, furieux, dit entre haut et bas en anglais : "Vous ne voyez donc pas que vous jouez avec des fripons ?" Malheureusement, il fut compris et s'aperçut avec effroi que le mot circulait autour de la table... Il leur fallut disparaître au plus vite, en chaise de poste... dont l'essieu se brisa à Essonne... et pas un sou pour payer le charron qui répare... et de ce fait, les garde prisonniers ! Heureusement, un voyageur de passage, qui les reconnaitra, payera pour eux et ainsi les libérera.
A Nancy, mais surtout à Lunéville et à Commercy, la Cour du bon Roy Stanislas est charmante et moins guindée qu'à Versailles. La Marquise espérait obtenir du Roy une pension pour son mari ; Voltaire, lui, attendait des plaisirs pour sa vanité. Quand les deux illustres compères arrivèrent à Lunéville, toute la petite cour fut transportée de joie : On allait avoir des dîners énivrants, des intrigues nouvelles, du théâtre et de la comédie... La Marquise en jouait mais une certaine plume lui servit, en rime, cette réplique :
"Il n'est de plus sotte guenon de Paris en Lorraine,
Que celle dont je tais le nom, qu'on peut trouver sans peine.
Vous la voyez, coiffée de fleurs, danser, chanter sans cesse,
Et surtout elle a la fureur d'être grande princesse.
Cette princesse a cinquante ans marqués sur son visage
Elle a des amis très insolents ; du monde : aucun usage...
Elle est dépourvue d'agréments, chargée de ridicules...
Et, pour Monsieur de Guébriant, elle a pris des pilules !"
( L'allusion finale vise un ancien amant de Madame du Châtelet. A la rupture, la Marquise tenta de se suicider ).
Voltaire consola la belle Emilie, d'un madrigal...
Le couple s'installa au Château de Luneville, dans des appartements proches de ceux du Roy ; le Marquis du Châtelet fut nommé Grand Maréchal des Logis du Roi, avec pension de 3000 écus...
Puis, les ardeurs de Voltaire envers la Marquise ne furent plus qu'un souvenir. Il reconnaissait qu'à 54 ans, il ne célébrait plus certains cultes (là aussi, il mentait !). Quoi qu'il en soit, à la place de cet "amant de neige", -ainsi qu'elle l'appelait-, Emilie va accueillir (ou attirer ,) un nouveau papillon, le Marquis de Saint Lambert, de 11 ans son cadet, officier au service du Roi. Voltaire découvre son infortune en octobre 1748 et veut rompre ; la Marquise refuse : que dirait-on à la Cour ? Dans le monde ? Dans sa famille ? Il est amant officiel depuis 15 ans. et Monsieur du Châtelet ? Il ne supporterait pas. Cette rupture, aussi scandaleuse qu'un divorce, devait être évitée : elle le fut. La Marquise savait manoeuvrer son Voltaire qui finit par dire : " Ah, Madame, vous avez toujours raison, mais puisqu'il faut que les choses soient ainsi, du moins qu'elles ne se passent pas sous mes yeux". Il céda donc la place à son jeune rival et lui envoya ces vers :
"Saint Lambert, ce n'est que pour toi
Que ces belles fleurs sont écloses.
C'est ta main qui cueillent les roses
Et les épines sont pour moi."
Au début 1749, alors que la Marquise et Voltaire séjournaient à Cirey, La foudre tomba sur eux :
Emilie sombre, inquiète, traquée, finit par avouer qu'elle était enceinte. Quel expédient trouver ?
On fit venir Saint Lambert -A trois, on trouve mieux qu'à deux-. Il y eut des cris... puis des rires. Il fallait faire gober la nouvelle à Monsieur du Châtelet... On fit dire au Marquis de venir de toute urgence, pour affaire. Jamais guerrier ne fut mieux accueilli : on le fit trôner à sa propre table, on provoqua sa pesante éloquence militaire, on n'était jamais rassasié de ses prouesses : Voltaire poussait des cris héroïques ; Emilie, en grand décolleté, provoquante, lui témoignait une admiration débordante ; elle lui fit tant d'agaceries que le ménage, séparé depuis 16 ans, se retrouva, pour une brève lune de miel, dans le lit conjugal.
Quelques semaines plus tard, le Marquis, apprenant la nouvelle d'une future naissance, exulta. Il fit informer le voisinage; les paysans, soudoyés par Voltaire, firent une fête à leur seigneur qui, rapidement, repartit prendre sa place aux armées. Saint Lambert regagna Lunéville, Emilie et Voltaire, Paris.

Cependant, Madame du Châtelet travaillant comme une forcenée, voulait finir sa traduction de Newton. En été 1749, ils rentrèrent en Lorraine, à la Cour de Commercy, accueillis très agréablement par le Roi, puis à la Cour de Lunéville. Emilie avait terminé sa traduction, rangé ses papiers ; elle était devenue douce, elle ne se fâchait plus ; elle avait écrit des lettres "à remettre après" à son mari, à leurs amis, car elle appréhendait son accouchement.
Le 4 septembre 1749, elle mit au monde, sans douleurs, une petite fille ; la voilà donc délivrée de ses appréhensions. L'enfant, allant fort bien, fut mis en nourrice.
Emilie commit une imprudence ; il faisait chaud, elle avait soif ; elle but un grand verre d'orgeat à la glace. Presqu’aussitôt, elle fut saisie d’affreuses douleurs. Le lendemain soir, 10 septembre, elle perdit connaissance et mourut : Monsieur du Châtelet, rappelé d'urgence, arriva après son décès.
A Paris, la mort de la "divine Uranie" est célébrée avec sarcasmes ; elle était supérieure à la plupart des perruches qu'elle fréquentait ; on n'aimait pas Voltaire pour les mêmes raisons...
La Marquise du Châtelet fut inhumée dans l'église Saint Jacques à Lunéville.
Le Marquis aida Voltaire à déménager de Cirey : Les livres, certains tableaux, des statues partirent en convoi et Monsieur du Châtelet et son fils restèrent seuls dans un château à moitié vide et déjà privé d'âme.
Avant de disparaître, cette comète fut elle visible à Loisey ?
On sait que sa correspondance privée fut brûlée à sa mort (on impute cette destruction à Saint Lambert). On n'a pas retrouvé de journal. Seules, les archives témoignent.


Emilie fut à Loisey à l'occasion du mariage du secrétaire de Monsieur le Marquis, le 28 octobre 1729.
C'est l'une des seules traces d'un séjour d'Emilie à Loisey ; elle avait alors 23 ans, mariée depuis 4 ans.
Elle ne connaîtra Voltaire qu'encore quatre ans plus tard.
Et son illustre écrivain séjourna-t-il à Loisey ?
Venant de Cirey (Haute-Marne) et allant à Commercy ou Lunéville, il passait vraisemblablement sur la route de Bar à Ligny, donc à proximité. On sait qu'il s'arrêta à Ligny-en-Barrois en mars 1748 où, invité par le Comte de Luxembourg, il composa un poème.
Autres présomptions de passage : Ecrivant le 27 novembre 1738, il se domicilie "à Bar Le Duc ou tout auprès".
Voltaire, à Bar, se procure de l'argent hollandais. En outre, il fait imprimer dans cette ville, chez Brifflot, la quatrième édition de son oeuvre "Zadig ou la destinée".
Entre février 1748 et septembre 1749, le couple Voltaire-Emilie fit quatre séjours à la Cour du Roi Stanislas... d'où des possibilités de passage à Loisey...
Et après quelques recherches, nous avons effectivement retrouvé pour l'instant deux traces écrites d'une présence ou d'un passage de Voltaire à Loisey...


Parti de Lunéville le 20 décembre 1748, il trouve refuge un soir au château de Loisey. Gabrielle-Emilie l'accompagne et, naturellement, lui offre l’hospitalité chez son beau-frère, Florent-François du Châtelet.
Monsieur de Voltaire prétend aux plus hautes fréquentations. Ici en plus, il sera « en famille »... comme à Cirey-sur-Blaise !
Le 24 décembre 1748, il écrit une lettre à Monsieur de Cideville.
La lettre à peine scellée, il faut filer à Cirey pour fêter Noël.
Le "ménage" Emilie-Voltaire retrouve son nid, bien refroidi maintenant. L'un et l'autre travaillent pour la postérité. La marquise rêve de son amant, le beau marquis de Saint-Lambert, tout en traduisant 'Newton" d'arrache-pied... Il lui reste encore moins de neuf mois à vivre.
De son écriture incomparable, Voltaire défend le faible et égratigne les institutions. Il entretient aussi des relations avec tous les Grands d'Europe.
Si elles sont flattées par ce grand esprit et les éloges prodiguées, les élites ne suivent pas pour autant les conseils reçus.
Voltaire laisse une oeuvre écrite colossale, un peu à l'image de sa fortune... Sur cette dernière, il n'écrira pas un mot.
Les châteaux et la Maison du Châtelet présenteront porte close à Voltaire après le décès d'Emilie, marquise du Châtelet, survenu le 10 septembre 1749 à Lunéville.

Gabrielle Émilie Le Tonnelier de Breteuil,
marquise du Châtelet (1706-1749)
Portrait par Maurice Quentin de la Tour.
(Domaine public via Wikimedia Commons)

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

François-Marie Arouet (1694–1778), dit Voltaire.
Portrait de Voltaire jeune par Maurice Quentin de la Tour.
(Domaine public via Wikimedia Commons)

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

Extrait de la correspondance de Voltaire, année 1748.
Lettre de Voltaire pour Mr de Cideville, écrite à Loisey,
et datée du 24 décembre 1748.
L'original de cette lettre est conservé à l'Institut
et Musée Voltaire de Genève (Suisse)

 


A Loisey, près de Bar, 24 décembre.


Je ne suis plus qu'un prosateur bien mince,
Singe de Pline, orateur de province,
Louant tout haut mon roi qui n'en sait rien,
Et négligeant, pour amuser un prince,
Un sage ami qui s'en aperçoit bien.


Vous, casanier dans un séjour champêtre,
Pour des Phyllis vous me quittez peut-être.
L'amour encor vous fait sentir ses coups.
Heureux qui peut tromper des infidèles !
C'est votre lot. Vous courtisez des belles,
Et moi des rois : j'ai bien plus tort que vous.


Il est vrai, mon cher Cideville, que ma main est devenue bien paresseuse d’écrire, mais assurément mon cœur ne l'est pas de vous aimer. Je suis devenu courtisan par hasard ; mais je n’ai pas cessé de travailler à Lunéville. J'y ai presque achevé l'histoire de cette maudite guerre, qui vient enfin de finir par une paix que je trouve très glorieuse, puisqu'elle assure la tranquillité publique. Fatigué, excédé de confronter et d'extraire des relations, je n'écrivais plus à mes amis ; mais soyez bien sûr qu'en compilant mes rapsodies historiques, je pensais toujours à vous. Je me disais : Approuvera-t-il cet endroit ? Y trouvera-t-il des vérités qui puissent être bien reçues ? N'en ai-je pas dit trop ou trop peu ? Je vous attends à Paris pour vous montrer tout cela. J'y serai au mois de janvier. Nous allons passer les fêtes de Noël à Cirey, après quoi je compte rester presque tout l'hiver à Paris. J'ignore encore si j’y verrai Catilina. On dit qu'on l’a retiré ; en ce cas, il faudra bien redonner Sémiramis, que j’ai retouchée avec assez de soin, et dont je me flatte que les décorations seront plus magnifiques sous l'empire du maréchal de Richelieu que sous le consulat du duc de Fleury. J'ai un peu de peine à transporter Athènes dans Paris. Nos jeunes gens ne sont pas Grecs ; mais je les accoutumerai au grand tragique, ou je ne pourrai.
Adieu ; je vous embrasse de tout mon coeur.

 

Portrait de Pierre-Robert Le Cornier de Cideville (1693-1776) par Guillaume Voiriot (Domaine public, via Wikimedia Commons).
Ce grand ami de Voltaire était un magistrat et lettré français, cofondateur de l’Académie de Rouen.

 

 

- Le 14 septembre 1749, Voltaire écrit une courte lettre à son ami l'abbé de Voisenon, à qui il avait raconté quelques jours auparavant, l'accouchement sans problème de la marquise du Châtelet et la naissance d'une petite fille.
La marquise décédera six jours plus tard...
Accompagné du marquis Florent-Claude du Châtelet, Voltaire quitte alors Lunéville juste après les funérailles pour se rendre à Cirey.
Ce 14 septembre, il semble faire étape au château de Loisey.

 

 

Extrait de la correspondance de Voltaire année 1749.
Lettre de Voltaire à l'abbé de Voisenon, datée du 14 septembre 1749.

 


Auprès de Bar, ce 14 septembre.

 


Mon cher abbé , mon cher ami, que vous avais-je écrit ! Quelle joie malheureuse ! Quelle suite funeste ! Quelle complication de malheurs, qui rendraient encore mon état plus affreux, s’il pouvait l'être ! Conservez-vous, vivez ; et si je suis en vie, je viendrai bientôt verser dans votre sein des larmes qui ne tariront jamais.
Je n'abandonne pas M. du Châtelet, je vais à Cirey avec lui. Il faut y aller, il faut remplir ce cruel devoir. Je reverrai donc ce château que l'amitié avait embelli, et où j’espérais mourir dans les bras de votre amie! Il faudra bien revenir à Paris ; je compte vous y voir. J'ai une répugnance horrible à être enterré à Paris ; je vous en dirai les raisons. Ah, cher abbé, quelle perte !

 

 

 

 

On ne sait pas exactement quand Florent-Claude du Châtelet, veuf d'Emilie, revint à Loisey où il décéda le 28 novembre 1765 à l'âge de 70 ans.
Inhumé au choeur de l'église de Loisey, sa pierre tombale, martyrisée à la Révolution, donne sommairement ses états de service :
Florent-Claude Marquis du Châtelet-Lomont
Lieutenant Général des Armées du Roi
Gouverneur de Semur en Auxois et de Toul
Grand Bailly de Saarlouis, du pays d'Auxois, de Lamarche en Barrois
Grand Chambellan de Lorraine
Baron de Cirey le Château et autres lieux
Grand Croix de l'Ordre Royal et Militaire de Saint-Louis.


Du mariage de Florent-Claude du Châtelet et d'Emilie le Tonnelier de Breteuil naquirent "officiellement" quatre enfants:
- Marie-Gabrielle-Florence le 30 juin 1726, mariée à Dom Alphonse de Caraffa, Duc de Montenero, décédée à Naples le 8 août 1754 à l'âge de 28 ans ;
- Louis-Marie-Florent né à Semur-en-Auxois le 20 novembre 1727, dernier du nom dans cette branche ;
- Victor-Esprit, né en 1734, mort au berceau ;
- Stanislas-Adélaïde, la dernière fille, née le 4 septembre 1749 à Lunéville, et décédée peu de temps après sa mère.

 


 

 
 

 

Extrait d'un feuilleton télévisé en 6 épisodes consacré à Voltaire,
et diffusé en 1978 à l'occasion du bicentenaire de la mort du philosophe.

C'est l'une des trés rares et courtes scènes ou l'on peut voir ensemble Voltaire converser avec le marquis et la marquise du Châtelet dans leur château de Cirey.
Avec Denis Manuel (Voltaire), Martine Sarcey (La marquise Emilie du Châtelet), Bernard Lavalette (Le marquis Florent-Claude du Châtelet)

 

 

 

 


 

Louis-Marie-Florent, duc du Châtelet :

Dès l'âge de 16 ans, Louis-Marie-Florent du Châtelet, second enfant de Florent-Claude et Emilie, est pris comme aide de camp par son père.
Colonel à 19 ans, il est aussi Chambellan du Roi Stanislas, Duc de Lorraine, avec 4000 livres de revenus.
La prébende semble sans doute insuffisante, car, nommé également menin (compagnon) du Dauphin, ce dernier demande à Stanislas que la pension de son ami soit augmentée de 6000 livres, afin que le mariage projeté de Louis-Marie Florent avec Marie-Adélaïde de Rochechouart soit protégé, la mariée étant sans fortune.
Stanislas meurt. La Lorraine est alors rattachée à la France, les charges liées à la Cour de Lunéville disparaissent, et Louis-Marie-Florent perd sa charge de premier Chambellan.

Colonel au Régiment de Navarre, il fait campagne pendant la guerre de 7 ans. Blessé en juillet 1757, il reçoit la Croix de Saint-Louis des mains du Roi Louis XV qui le nomme Brigadier d'infanterie le mois suivant.
Il est promu Maréchal de Camp à 34 ans en 1761.
Cette année-là, son ami le Duc de Choiseul-Stainville le fait détacher de l'armée et nommer Ambassadeur à Vienne. Pendant cette mission, il représente la France à Francfort. La Diète y élit le duc de Lorraine François III, empereur des Romains et Roi de Germanie, devenu entre-temps Empereur d’Autriche sous le nom de François Ier.
A cette occasion, le Comte de Boufflers, présent à Francfort, fait de l'ambassadrice la Comtesse du Châtelet-Lomont, les plus vifs éloges.


En 1764, de passage à Loisey, il signe comme témoin un acte de mariage, comme il l'avait déjà fait en 1761. Ce sont les derniers indices de sa présence à Loisey.
L'ambassade de Londres, en juin 1767, succède à celle de Vienne : Tâche plus ingrate, la guerre de 7 ans est encore proche, et l'Angleterre remporte des succès coloniaux très marqués.
L'ambassadeur est intelligent, cultivé. Mais il a un caractère violent. Il parle haut et ferme sur les sujets de Saint-Pierre et Miquelon, sur la Corse, là où les intérêts de la France sont en jeu.
A la suite d'un incident naval grave, il remet un ultimatum au Roi d'Angleterre le 13 février 1770. Mais les choses s'apaisent.
Son caractère emporté l'amènera à se battre en duel en 1769 avec l'ambassadeur de Russie, pour une question d'étiquette... Puis il en exigera des excuses publiques.
Il pousse Choiseul à soutenir les Insurgents soulevés contre les Anglais, pendant la révolte d'indépendance américaine.
Il quitte la diplomatie en 1770 et reprend du service comme Colonel Inspecteur du Régiment du Roi-Infanterie.
La même année, il se fait construire un bel hôtel particulier à Paris (hôtel qui porte toujours son nom au 127 rue de Grenelle, l'actuel siège du Ministère du Travail).
Les Duchés de Lorraine et de Bar étant rattachés à la France, Louix XV autorise la Chambre des Comptes de Bar à louer, par bail, les titres et bénéfices du Comté de Ligny et des Châtellenies d'Ancerville et de Petit-Louppy.
C'est Monsieur du Châtelet qui obtient ce bail emphytéotique de 99 ans. Il aurait payé au trésor royal la somme de 1.355.486 livres, le 20 novembre 1771...
Il se trouve ainsi à la tête d'un immense domaine : 59 villages, ce qui lui permet de concéder de nombreux droits de chasse : On trouve le relevé de 46 concessions dans le Comté de Ligny (en sus des 9 villages de la Châtellenie de Pierrefitte). Son influence sur la noblesse rurale en est accrue.

Après intervention de Marie-Antoinette, sollicitée par Choiseul, Louis XVI lui confère le titre de Duc en 1777.
Son oncle, Florent-François, châtelain à Loisey, décède en juillet 1783. Le Duc hérite de son château (murs et meubles).
Deux ans plus tard, il est l'exécuteur testamentaire de son protecteur et ami, le Duc de Choiseul qui, en mourant, lui lègue sa bibliothèque de Paris.


Revenons à sa carrière militaire :
En avril 1780, gouverneur et bailly de Pont-à-Mousson, il est promu général des armées et se voit, en outre, conférer le titre de gouverneur de Toul et du Toulois, tout en conservant ses fonctions de Colonel Inspecteur du Régiment du Roi. En 1788, il commande la 1ère Division de Lorraine. La charge de colonel des Gardes Françaises échoit, la même année, au duc du Châtelet, à la grande déconvenue de ce corps qui souhaitait Lauzun.
Il veut renforcer la discipline. Ce qui, en cette période de fermentation générale, n'arrange pas les choses.


En mars 1787, le Roi décide de créer des administrations provinciales formées par des assemblées de paroisses...
Une décision qui attire les critiques des gens en place, en particulier dans le Barrois.
Ces assemblées seront formées à moitié par des membres de la noblesse et du clergé, l'autre moitié par le Tiers-Etat.
Pour la première assemblée de Champagne, le Roi nomme les 16 membres qui éliront les autres au scrutin : Le duc du Châtelet figure au 3ème rang, derrière les Archevêques de Reims et de Langres (donc il est le premier dans la noblesse).
Le duc du Châtelet va décliner la proposition la plus importante qu'il ait reçue : Lorsque Lomenie de Brienne quitte le Ministère des Finances en août 1788, la charge lui est proposée. Il ne donne pas suite. Est-ce par prudence ?...
En mars 1789, pour préparer les Etats Généraux, les membres de la noblesse du Baillage de Bar établissent leur cahier de doléances. Critiques et suggestions sont nombreuses, dans tous les domaines. Retenons celle-ci : "La suppression de la Bastille, et qu'une statue de Louis XVI soit érigée à son emplacement : Symbole de la liberté donnée au peuple !".
Le duc du Châtelet est, par ordre de préséance, troisième sur la liste des 241 membres de la noblesse du Barrois. Mais il est absent et il donne procuration au Lieutenant Colonel de Vassimont. C'est donc cet officier qui signera le cahier, avec les 125 collègues ayant participé à son élaboration.
C'est Louis-Marie-Florent du Châtelet qui est élu par ses pairs, représentant de la noblesse du Barrois aux Etats Généraux. Il a les titres suivants : Duc du Châtelet d'Haraucourt, Chevalier des Ordres du Roy, Lieutenant Général de ses armées, Colonel du Régiment des Gardes Françaises, Seigneur du Comté de Ligny et de la Châtellenie de Pierrefitte. Dans le défilé inaugurant la réunion des Etats Généraux, il devait, dans son ordre, avoir belle allure...

La Révolution :

L'orage qui pesait depuis si longtemps fait entendre ses premiers grondements.
Le 24 juin 1789, dans le Régiment des Gardes Françaises, unité d'élite commandée par le Duc du Châtelet et stationnée à Paris, deux compagnies refusent le service. Le réglement voulait que l'on punît. Le duc ne le fait pas, mais consigne le Régiment.
Quatre jours après, la situation étant troublée à Paris et à Versailles, on distribue des cartouches : Refusant de coopérer au maintien de l'ordre, la majeure partie des hommes jette leurs armes.
Comme toujours en période insurrectionnelle, la troupe a des sentiments mitigés : Ainsi le 12 juillet, le duc, reconnu par une foule haineuse, est protégé du lynchage par certains de ses hommes.
Le 14 juillet, les Gardes Françaises font cause commune, en grande partie, avec les émeutiers, marchant avec eux sur la Bastille... prise et démolie dans une ambiance que n'avaient pas imaginée les rédacteurs du cahier de doléances !
Puisqu'il ne peut plus commander, le Duc du Châtelet se démet de ses fonctions de Colonel des Gardes Françaises.
Il va donc siéger à l'assemblée dont il est un élu.
Dans la nuit du 4 août, dans cette assemblée, chacun sacrifie le bien de son voisin : L'évêque Lubersac propose la suppression du droit exclusif de la chasse... Monsieur du Châtelet, très fortement impliqué, murmure à son voisin :
"L’évêque nous ôte la chasse, je vais lui ôter ses dîmes !" Ce qui est proposé et obtenu...
En 1790, en tant qu’inspecteur du Régiment du Roi stationné Caserne Sainte Catherine à Nancy, il a fort à faire pour que s'apaise une rumeur de prévarication, en donnant des preuves comptables de sa gestion des 6 dernières années.
En septembre 1791, l'Assemblée Nationale ayant terminé sa tâche, le mandat du duc prend fin.
Il se défait, le 20 décembre, du bail obtenu sur le comté de Ligny en 1772. Les biens ainsi libérés entrent dans la régie des domaines nationaux.
On le dit, à cette époque, familier des Tuileries. On a retrouvé plusieurs récépissés de sommes prêtées par lui, au Roi, dont l'un de 550.000 livres daté du 9 août 1792.
Le lendemain, 10 août, marque le destin du duc : Avec 300 chevaliers de Saint-Louis, il est présent aux côtés du Roi, au moment de l'assaut des Tuileries, assurant la défense de la famille royale.
Sur ordre du Roi, les défenseurs se dispersent. Il trouve refuge chez son ami, l'ancien Fermier Général Douet, rue Bergère où sa femme le rejoint.


A partir de ce jour, et pendant plus d'un an, la vie et l'itinéraire du duc ne sont plus connus avec précision.
Au cours d'une perquisition chez son ami Douet (réalisée plus tard en novembre 1793), on surprend celui-ci voulant détruire une reconnaissance de dette de 500.000 livres, somme que le duc lui avait empruntée le 12 août 1792, remboursable un an après, avec intérêt de 5 %.
C'est sans doute ce viatique qui lui aurait permis de vivre plus d'un an d'une vie errante, et à sa femme de vivre, de payer les domestiques... et les complicités nécessaires pour l'établissement de faux documents.
Le duc aurait quitté Paris le 13 septembre, sa femme le 17. lls se retrouvèrent sans doute à Boulogne. On ne sait pas quand sa femme rentra à Paris.
Le 1er novembre, il écrit, disant vivre modestement grâce aux assignats emportés au départ de Paris.
Il demande des certificats de résidence : Lors d'une perquisition à son domicile, on en retrouve quatre dont deux en blanc, le tout d'origine douteuse.
Resté introuvable, il est déclaré émigré le 6 février 1793. Emigra-t-il réellement ? Il n'y a aucune preuve et on pense que non (il sera rayé de la liste le 20 octobre 1800).
La pagaille administrative révolutionnaire se contredisait dans la manière de définir le fait d'émigration : Ainsi, les 30 mai et 20 juin 1793, le département de Paris avait-il prononcé la non émigration du duc, puis il avait sursis à l'inventaire et vente de ses biens, en attendant qu'il fournisse des certificats conformes à la nouvelle loi.
Le Comité de Salut Public lui obtint un passeport pour Boulogne qui lui fut envoyé subrepticement dans sa retraite.
Se croyant ainsi couvert, il commença peut-être à se montrer.

Début septembre 1793, après 13 mois de disparition, le Duc du Châtelet (on suppose, dénoncé par un noble bien renseigné) est arrêté à Picquigny à 13 kilomètres d'Amiens. Il est transféré à Paris.
Le 24 octobre, des citoyens de Picquigny se présentent à la barre de la Convention. L'un d'eux déploie un drapeau blanc brodé d'argent et d'or qui aurait été saisi sur le duc lors de son arrestation.
Le duc est incarcéré à la Force, puis à Sainte-Pélagie, et ensuite à la Conciergerie, en salle commune.
Le procès a lieu le 13 décembre. Le tribunal est présidé par Dumas, ancien novice bénédictin, avec comme assesseur Donze Verteuil, ancien jésuite du collège de Nancy, accusateur Fouquier-Tinville, défenseur Chauveau-Lagarde (celui qui défendit Charlotte Corday).
On y lit que le duc demeurait ordinairement à Paris.
Les jurés répondent oui, à l'unanimité, aux questions suivantes :
- A-t-il participé aux conspirations formées contre le peuple et la République et provoqué les affaires de Nancy ?
- A-t-il participé au massacre des patriotes du Jardin des Tuileries ?
- A-t-il émigré ?
- Est-il rentré en France muni d'un guidon aux armes de France, signe de ralliement contre-révolutionnaire?


Le Duc du Châtelet est condamné à mort et guillotiné le 13 décembre 1793 (exécuté au Champ de Mars, on ne connaît pas le lieu de sa sépulture).
On a écrit que le duc avait essayé "d'acheter" les gendarmes qui le gardaient, mais il n'y a pas de preuve.
Il tenta de se suicider en se cognant la tête contre le mur, puis essaya de s'enfoncer un morceau de verre dans le coeur. Le verre ayant cassé, il se laboura la poitrine avec l'éclat restant, espérant peut-être mourir d'hémorragie.
On dut l'aider pour monter dans la charrette, ses jambes ne le portant plus. Le bourreau Samson a raconté que, se proposant de lui comprimer le sang avec un mouchoir, le duc lui aurait dit : "Laisse donc, c'est autant de besogne que je t'épargne !" Il aurait retrouvé un peu de force et se serait placé lui-même sur la bascule en criant "Vive le Roi".


Au moment où le duc est guillotiné, sa femme Adélaïde de Rochechouart est incarcérée depuis quatre jours à la prison de la Petite Force, à Paris, en compagnie de son amie, la Duchesse de Gramont...
Revenons rapidement sur le proche passé...
Les récits divergent sur la période suivant immédiatement le départ de Paris de Monsieur du Châtelet...
On peut retenir que, accusée d'émigration, Madame du Châtelet fut arrêtée dans son hôtel au 127 rue de Grenelle à une date non précisée.
Faute de preuve, on la relâcha le 17 février 1793. Son hôtel ayant été mis sous scellés, elle habita chez son amie la Duchesse de Gramont, au 2 rue Grange Batellière (actuellement rue Drouot, angle des Grands Boulevards).
Elle fut interrogée pour savoir où était son fils (personnage dont on recherche, en vain, la trace).
Arrêtée (avec son amie), puis relâchée faute de place en prison, et ensuite internées toutes les deux à la maison de santé Belhomme, elles furent transférées de nouveau dans les prisons de la Petite Force, de Port Libre.
Et enfin, elles sont écrouées sans énoncé de motif à la Conciergerie, sur l'ordre de Fouquier-Tinville.
Dans cette dernière prison, on aurait proposé la vie sauve à Madame de Gramont, si elle indiquait le lieu où se trouvait le Comte du Châtelet, fils de la Duchesse...
Présentées au tribunal révolutionnaire le 22 avril 1794, elles sont condamnées à mort et exécutées le même jour (sans doute au Champ de Mars).
Au pied de l'échafaud, la Duchesse de Gramont connaissant la sensibilité de Madame du Châtelet, lui céda le pas, disant "après vous, ma cousine".
Les corps des suppliciées furent transférées au cimetière de Picpus.
Le duc est mort à 66 ans, la duchesse à 61 ans.
Le 16 juillet 1795, la Convention prenait un arrêté envoyé aux départements et au district de Bar, prescrivant de surseoir à la vente des biens des "du Châtelet", jusqu'à ce qu'il soit statué sur la demande de radiation de la liste des émigrés, formulée par les héritiers, mais il était trop tard...

La Révolution va faire réapparaître sur la scène du château de Loisey des personnages déjà cités.
Devenu prison pendant quelques jours en juin 1793, le château abritera dans ses murs les "inciviques ou fanatiques" du village, dont Pierre Varin, ancien Mayre Royal, l'un des hommes de confiance de Florent-François du Châtelet.
En septembre 1794, l’administration sommera Perrard, l’ancien valet de chambre du seigneur, de lui remettre les clés du château, puis elle fera détruire à la masse les armoiries sculptées sur les murs.
La même destruction est ordonnée sur et dans l'église, en même temps que l’on martèle les pierres tombales des deux frères, Florent-Claude et Florent-François enterrés dans l'église.
Ainsi, à Paris, la Révolution jette les "du Châtelet" au charnier ; et à Loisey, elle les précipite dans le néant.


Le château de Loisey, après avoir été classé par le district de Bar, comme "pouvant convenir pour de grands établissements", est vendu en quatre lots le 9 janvier 1795.
La vente "aux feux" donne les résultats suivants :
- 1er lot : (en gros, les "communs") estimé à 4500 livres, est vendu 30.300 livres à M. Couchot de Trémont.
- 2ème lot : (le corps de logis principal) estimé à 13000 livres, est vendu 100.000 livres à M. Thirion de Trémont.
- 3ème lot : (une partie du jardin avec un bâtiment secondaire) estimé à 2500 livres, est vendu 13000 livres à M. Michaud de Combles.
- 4ème lot : (deuxième partie du jardin) estimé à 3500 livres, est vendu 15300 livres à M. Bastien de Bar.
Les principales conditions étaient les suivantes : Paiement de 1/10° dans le mois d’achat, puis 1/10° chaque année avec 5% d'intérêt. On ne pourra démolir qu’après avoir payé les 2/3 du prix total.
François Morel, chirurgien, notaire, et autre homme de confiance du seigneur, avait, avant la vente, obtenu le fermage du parc et des terrains du château... Quelques années après la vente, à la suite de transactions diverses, il achète 5000 m2 de l’ancien jardin... ll est vrai que la Révolution lui avait ouvert une carrière politique : Membre du Comité Révolutionnaire de Bar, il fut aussi président de l’administration du canton de Loisey...


Derniers frémissements de vie :
En 1807, Diane-Adélaïde de Damas, cohéritière de Diane-Adélaïde de Rochechouart, veuve de Louis-Marie-Florent du Châtelet, demande qu’en fonction des lois édictées au sujet des émigrés, les 55 hectares de forêt de Sainte-Geneviève vendus par le Roi Stanislas à Florent du Châtelet, lui soient rendus.
Elle est déboutée... En 1816, à la Restauration, la même question est posée. La réponse n'est pas connue.
Vendu, le château n’intéresse plus l’administration... Silence dans les archives !
Quand fut donné le premier coup de pioche ? Quand enlève-t-on la dernière pierre ? On ne sait pas !
La presse locale écrit en 1905 que, se rendant à Loisey en visite officielle, le Secrétaire Général de la Préfecture avait visité les derniers vestiges du château.


Si les pierres parlaient, plusieurs façades de Loisey, et d'autres villages aux alentours avoueraient du "sang bleu" dans leur généalogie...
Les façades sont muettes, mais on peut aussi essayer de faire causer les quatre bancs de pierre de la Grande Rue de Loisey, rescapés du château : Histoires locales, régionales, Histoire de France, ils peuvent en dire des choses !

Bernard THOMAS

 


Portrait du duc et député Louis-Marie-Florent du Châtelet.

 

 

 

 

 

 

Hôtel du Châtelet

L'Hôtel du Châtelet, situé au 127 rue de Grenelle à Paris, fut édifié en 1770 pour Louis-Marie-Florent.

Historique de L'Hôtel du Châtelet à Paris.

 

 

 

 

 

 

 

Le duc du Châtelet voulant passer le bac devant les Invalides.
Gravure du XIXème siècle.
(Source Gallica - Bibliothèque nationale de France)

 

 

 

 

 

 

Les gardes françaises sauvant le duc du Châtelet le 12 juillet 1789.
Gravure d'époque.

 

 

 

 

 

 

Certificat de présence du duc du Châtelet à Paris en 1792 (Document J-P Kapusta pour Mr Bernard Thomas)

Certificat de résidence du duc du Châtelet à Paris en 1792 (Document J-P Kapusta pour Mr Bernard Thomas)

 

 

 

 

 

 

 

Diane-Adélaïde de Simiane née Diane-Adélaïde de Damas (vers 1800)
Inconnu (École française) Domaine public via Wikimedia Commons

 

 

 

 

 

 

 

Sources :

Archives départementales de la Meuse :
Série A : 3-14-61-55a
Série AA : 504-696
Série B : 252-275-320-325-374-393-725-3044-3045
Série 2B : 536-836-837
Série BE : 5760
Sérié C : 345-589-689-760
Série E : E-dépôt 222 = 1 E5/1 E6/ ARC 3I-1 ( (MI 1067-MI 1068) - A R C 3 I.1,2,3,4
Série 11E : 95-188
Série 13E : 160—332—336-337-338—346-347-348-349-350-352
Série-15E : 611-612-614-620-621-622-626-637-648-650-651
Série 19 :113
Série 44EP : 599 - 36
Série F : 5F6
Série H : 29H6
Série J : 1J168-1J251-19J5867-55J12-59J6
Série L : 199-210-1028-1611—1612—1616-2141-2170 - L944-03
Série P : P 987
Série PL : 9112
série Q : 15-16-62-116-120-169-236-275-528-556-559-566-625-737-742-762-779-886-1068-1167-1288-1329
Série R : 100 (1879)-100(1882)-109(1886)-112(1978)-112t2-(1978)- 112(1934) - 112(1939)
Série U : 87U3 - 158T10

Médiathèque de Bar le Duc :
Dossiers : MS 1/47 - MS 726 - MS102/4 - MS737 -L944/04 - L944/03 -B146 - 733B72 - 310002


- Histoire du Barrois (Monseigneur Aimond)
- Dictionnaire de la noblesse
- Dictionnaire des monuments de Paris
- Histoire généalogique de la famille Du Châtelet (Dom Calmet)
- Armorial de Lorraine et du Barrois (Dom Pelletier)
- En plein coeur du Barrois (Abbé Joignon)
- Biographie générale (Firmin Didot)
- Voltaire de Jean Orieux (Larges extraits recomposés)
- Le théâtre en Lorraine de Michel Caffier (Larges extraits recomposés)
- Cirey-le-Château par Mr l'abbé Piot - Société des lettres de Saint-Dizier 1892 (Gallica - BNF)
- Correspondance générale de Voltaire Tome III - Baudouin Editeur, Paris 1827 (Gallica - BNF)

 

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